Sherlock Holmes

Détective consultant
Détective consultant

14. Sa méthode

Introduction : pour cette partie-ci, je me suis basé sur le site de la SSHF. Lorsque j'aurai un peu plus de temps, j'ajouterai aussi ce que j'avais lu dans "l'affaire du chien des Baskerville" que j'ai lu en 2008. L'auteur détaillait plus les méthodes de Holmes, mais aussi ses échecs, que j'aborderai dans le chapitre suivant.

L'un des traits les plus marquants du célèbre détective auprès du grand public est sans aucun doute la méthode qu'il emploie dans ses investigations.

 

Chacun a en tête le souvenir d'un Sherlock Holmes furetant ici et là, loupe à la main, à la recherche du plus petit indice.

 

Mais pourtant, plus que cette première phase consistant à rassembler des informations et des éléments de preuve, c'est sans doute la seconde phase de sa méthode qui força l'admiration et donna à Sherlock Holmes l'aura internationale qui ne l'a pas quittée depuis.

 

Prenons un exemple d'exploitation de ces données, tiré de La Ligue des rouquins (REDH) : "En dehors des faits évidents que Mr.Wilson a quelques temps pratiqué le travail manuel, qu'il prise, qu'il est franc-maçon, qu'il est allé en Chine, et qu'il a beaucoup écrit ces derniers temps, je ne puis rien déduire d'autre !"

 

Après avoir surpris son nouveau client (et le lecteur) avec cette succession de détails biographiques et personnels, Holmes continue en expliquant le cheminement de sa pensée : "Votre main droite est presque deux fois plus large que la gauche. Vous avez travaillé avec, et ses muscles ont pris de l'extension. [...] En contradiction avec le règlement de votre ordre, vous portez en guise d'épingle de cravate un arc et un compas. [...] Que peut indiquer d'autre cette manchette droite si lustrée ? Et cette tache claire près du coude gauche, à l'endroit où vous posez votre bras sur votre bureau ? [...] Légèrement au dessus de votre poignet droit, il y a un tatouage : le tatouage d'un poisson, qui n'a pu être fait qu'en Chine."

 

Bien que ses qualités ne soient pas toujours appréciées à leur juste valeur ("Hé Bien ! C’est formidable. Au début, j'ai cru que vous étiez intelligent, mais je m'aperçois que ça n'était pas si malin, au fond !" - Mr. Wilson dans La Ligue des rouquins), Holmes expose un vrai raisonnement, logique, rationnel et qui ne laisse aucune place à l'intuition.

 

Pourtant dans ses enquêtes ce tour de force n'est qu'une étape dans le processus en trois phases qui mène à la résolution d'un "mystère" :

-          l'observation,

-          la déduction (ou induction),

-          la synthèse logique.

Pour l'observation, les trois principes directeurs du détective sont les suivants :

Première règle :

"Il est essentiel de ne pas se laisser influencer par des qualités personnelles." (SIGN).

 

Holmes fait cette réflexion après une remarque de Watson concernant la beauté de Mary Morstan. Tandis que le docteur est hypnotisé par les charmes de sa future femme, Holmes, lui, la scrute aussi froidement qu'il l'aurait fait en observant de la cendre de tabac sous son microscope.

 

Holmes dit souvent "qu'il peut lire dans une personne comme dans un livre ouvert."

Mais que peut lire celui qui ne distingue pas les lignes ? Ainsi tout ce qui peut dévier le jugement et l'attention : l'amour, la haine, le dégoût, l'attirance, ... est à proscrire pour l'analyste professionnel.

 

 

Deuxième règle :

"Il est difficile de se servir quotidiennement d'un objet sans que la personnalité de son possesseur y laisse des indices." (SIGN).

 

Au début de sa carrière, ce qui retenait particulièrement l'attention de Sherlock Holmes ce n'était pas l'aspect physique de ses clients mais plutôt leurs vêtements ou leurs accessoires. "Mon premier regard, s'il s'agit d'une femme, est pour les manches. S'il s'agit d'un homme, pour les genoux du pantalon" (IDEN).

 

Toutefois, vingt ans plus tard, il révise son jugement : "Il faut toujours commencer par regarder les mains, Watson. Ensuite les poignets de la chemise, les genoux du pantalon et les souliers" (CREE).

 

Le meilleur exemple de cette règle, nous le trouvons dans l'aventure de "L'Escarboucle bleue" (BLUE), où Holmes déduit d'un simple chapeau une douzaine d'informations (exactes) sur le propriétaire qu'il n'a jamais vu et qu'il ne connaît pas.

 

"D'après la surface frontale, son propriétaire est un intellectuel. Et alors qu'il était très à l'aise ces trois dernières années, il a mangé récemment de la vache enragée. On peut dire aussi de lui qu'il avait le don de prévoyance : moins à présent toutefois que jadis ; perte imputable, sans doute, à une certaine dégénérescence morale qui, jointe à des revers de fortune, paraît due elle-même à une influence détestable : la boisson, évidemment. Et ceci serait la justification du fait non moins évident que sa femme ne l'aime plus. [...] Cependant cet homme n'a pas perdu tout respect de soi-même. Nous nous trouvons en présence d'un gentleman qui mène une existence sédentaire, qui sort peu, qui n'est plus en bonne forme physique, qui est entre deux âges, et dont les cheveux grisonnent...Pour les cheveux, il les a fait couper ces jours-ci, et il les discipline d'habitude avec du cosmétique. [...] Il est extrêmement improbable qu'il habite une maison où le gaz soit installé."

 

Il est vrai néanmoins que l'adéquation entre les propositions de Sherlock Holmes et la réalité doit tout à la symbiose entre le détective et son univers : "Sherlock Holmes réussit toujours ses raisonnements avec la plus grande classe car ces derniers correspondent parfaitement à la réalité de son monde. Conan Doyle a simplement créé un univers à la mesure du héros, un univers dont le détective est le centre et qui reflète son égocentrisme. Le monde est construit pour et autour du personnage qui peut ainsi y prévoir l' "avenir" en choisissant les hypothèses les plus probables car il en connaît le fonctionnement. Et contrairement à Watson, pas d'échecs possibles pour le héros. Ainsi, toutes les abductions faites sur l'espace sont justes, car cet espace est organisé en fonction des besoins de Holmes."

 

(Loïc Ravenel, à propos d'un article d'Umberto Eco, Conjectures d'Aristote à Sherlock Holmes - Le magazine littéraire - Avril 1987 dans Les Aventures géographiques de Sherlock Holmes, p. 226, Editions Larousse).

 

 

Troisième règle :

"Comment avez-vous vu cela, Holmes ? - Parce que je le cherchais." (DANC).

 

L'art de l'observation n'est pas une question d'intelligence. Il s'agit d'un long entraînement et d'un gros travail de recherche.

 

Holmes "ne voit pas plus que les autres, mais il est entraîné à remarquer ce qu'il voit." (BLAN).

 

L'observateur amateur regarde, voit mais ne sait pas s'arrêter sur les détails d'importance parce qu'il n'a pas appris à le faire.

 

Tout comme les annales du crime, Holmes sait tout ce qu'il faut savoir sur les tissus, les boutons, les lunettes, les chaussures, les cicatrices, les traces et même certaines parties du corps.

 

Il est d'ailleurs l'auteur de plusieurs monographies : "De la distinction entre les cendres de divers tabacs", "La Détection des empreintes de pas", "Les Tatouages", "Les Différentes formes d'oreilles humaines", etc.

 

Mais cette dernière règle ne se limite pas aux clients.

 

Lorsqu'il est sur les lieux du crime Holmes sait où chercher car il sait ce dont le criminel a eu besoin et ce qu'il a pu laissé derrière lui.

"Vous connaissez ma méthode Watson. Je me mets à la place de l'homme, et ayant d'abord évalué l'ampleur de son intelligence, je m'efforce d'imaginer comment j'aurais moi-même agi dans des circonstances analogues." (MUSG).

 

 

La deuxième phase de la méthode est la déduction.

 

Elle a longtemps été le terme qui englobait toutes les facultés mentales de Sherlock Holmes. Cette contre-vérité est d'autant plus désagréable que ce terme est incorrectement employé. En effet, Holmes ne déduit pas, il induit.

 

La déduction est un processus d'élimination, de soustraction qui a longtemps été d'un grand secours aux enquêteurs antérieurs au détective.

Mais la déduction est une opération qui part du général pour arriver au particulier.

 

L'induction, elle, va du particulier au général : lorsque Holmes conclut que le propriétaire d'un fiacre est un médecin de médecine générale quand il remarque son panier d'osier contenant divers instruments médicaux, il part effectivement d'un fait particulier pour arriver à une généralité.

 

Jusqu'ici la méthode apparaît plutôt simple et, sinon reproductible, au moins accessible. Mais à ce stade elle ne peut suffire à résoudre les énigmes...

 

La méthode de Sherlock Holmes est plus savante.

Il y a un quelque chose en plus que le commun des mortels ne maîtrise pas et qui n'est cité qu'une seule fois dans l'aventure des Hêtres Rouges (COPP) : la synthèse logique.

"... les petites relations de nos aventures que vous avez eu la bonté de rédiger ne réservent pas la place d'honneur à ces causes célèbres et à ces procès sensationnels où j'ai joué un rôle. Vous avez préféré rendre compte d'affaires qui en elles-mêmes auraient été du dernier banal si elles n'avaient permis à ces facultés de déduction et de synthèse logique dont j'ai fait ma spécialité de se déployer hardiment."

 

La synthèse, au sens Hégélien, c'est de la création, la formation de quelque chose de nouveau à partir de divers éléments déjà existants.

 

Une fois que Sherlock Holmes a effectué toutes ses observations et "déductions", il lui faut trouver le fil qui les relie intégralement. Il lui faut une histoire, une explication.

"Aucune combinaison d'événements n'échappe à l'explication humaine. Une sorte d'exercice mental, sans aucune garantie de vérité, m'indique une ligne possible qui correspond aux faits. C'est, je le confesse, un travail de pure imagination ; mais combien de fois l'imagination ne s'est-elle pas révélée mère de la vérité ?" (VALL).

 

Et son imagination pouvait le mener très loin : "Sherlock Holmes, quand il avait un problème à résoudre, pouvait demeurer des jours entiers, et même une semaine sans se reposer : il tournait et retournait les faits dans sa tête, les examinait sous tous les angles jusqu'à ce qu'il eût bien approfondi le mystère, à moins qu'il ne trouvât insuffisants ses renseignements " Extrait de "L'Homme à la lèvre tordue" (TWIS).

 

Au bout du compte il pouvait avoir jusqu'à "sept explications distinctes ; chacune se rapportant aux faits tels que nous les connaissions" (Les Hêtres Rouges - COPP).

 

Une seule de ces explications s'avérera être la solution de l'énigme.

 

D'où sa célèbre maxime qu'il cite aussi comme une règle :

"Lorsque vous avez éliminé l'impossible, ce qui reste, aussi improbable que cela paraisse, doit être la vérité." (SIGN).