Rien de gravelleux dans le titres, mesdames ! Restons calme, je vous prie.
Je veux tout simplement vous parler des pipes que fumaient le détective... Ainsi que du tabac qu'il utilisait. Sans oublier qu'il fumait aussi la cigarette.
Comme je vous en parle aussi dans "Sus aux clichés sur Holmes", vous savez déjà (ou vous ne tarderez pas) qu'il ne fumait pas une pipe calebasse (Calabash).
Sherlock Holmes, comme la majorité des gentlemen de l'époque, fume que ce soit pour les vertus du tabac, par conformité, ou tout
simplement par plaisir.Je pencherais pour "le plaisir".
Il se définit lui-même comme un intoxiqué du tabac. Il fume des cigarettes (GOLD, HOUN...)
ou des cigares qu'il conserve dans un seau à charbon, (MUSG) ou il prise (IDEN), mais il fume avant tout la pipe dans
trente-cinq des aventures citées.
Dès sa rencontre avec Watson, (dans "Une étude en rouge" chapitre I), il lui déclare : "J'ai en vue un appartement dans Baker Street qui ferait parfaitement notre affaire. L'odeur du tabac fort ne vous incommode pas, j’espère ?".
Ce à quoi, Watson répond : "Je fume toujours du "Ship's" moi-même.".
Et voilà nos deux compères installés, fumant leur tabac fort. Dans quelles pipes ?
Bien souvent, Watson n'en dit rien. Pourtant, dans "Le chien des Baskerville" (chapitre III), Holmes tient entre ses lèvres sa pipe en terre noire. ("his black clay pipe.").
Les pipes en terre sont ordinairement blanches ou brunes.
Celles en terre noire sont nettement plus rares. En a-t-il été fabriqué en Grande-Bretagne ?
Parfois, lorsque le détective réfléchit intensément, il fume une pipe "puante".
Ainsi, dans "La vallée de la peur", (Première partie chapitre I), il allume "la pipe peu ragoûtante qui était la compagne de ses réflexions les plus profondes.". ("The unsavory pipe which was the companion of his deepest meditations.").
Le Docteur Watson, trop occupé sans doute à éloigner Holmes de la cocaïne, oublie d'attirer son attention sur le nécessaire respect des quelques règles élémentaires d'hygiène, indispensables à nos bouffardes.
Hommage à la tradition française, Sherlock Holmes fume également une pipe de bruyère. Ce n'est sans doute pas une toquade passagère puisque, dans "Le signe des quatre" (Chapitre I), elle est décrite comme vieille. ("His old briar-root pipe.").
Il a déjà été dit qu'Holmes et Watson affectionnent les tabacs forts.
On connaît aussi l'endroit où notre héros achète le sien.
Toujours dans "Le chien des Baskervilles", il demande à Watson : "Quand vous passerez devant Bradley's, pourriez-vous lui demander de me faire porter une livre de son plus fort tabac coupé fin." ("When you pass Bradley's would you ask him to send up a pound of the strongest shag tobacco?").
Cette boutique se situait dans Oxford Street (idem chapitre XII).
Holmes fume également la cigarette (Cf. par exemple "Le chien des Baskerville" chapitre I) et le cigare, dont il n'est d'ailleurs pas avare puisqu'il en offre à ses visiteurs ("Etude en rouge" première partie chapitre VI.)
N'oublions pas que Holmes à publié une monographie consacrée à l'identification des cendres de tabac.
Ce travail d'une haute valeur criminologique se nomme "Sur la Discrimination entre les Différents Tabacs" ("Upon the Distinction Between the Ashes of the Various Tobaccos").
Cette étude énumère cent quarante variétés de cigares, cigarettes et tabacs et est illustré de reproductions en couleurs présentant les différences d'aspect entre leurs cendres. ("Le signe des quatre" chapitre I).Cela lui sera très utile dans ses enquêtes, comme par exemple RESI.
Comme je vous le disait dans l'article consacré aux clichés holmésiens, la pipe calebasse n'est pas canonique pour deux
sous, même si on représente quasiment toujours Holmes avec cette monstruosité en bouche...
Mais c'est quoi au fait, cette pipe ?
Il s'agit en fait d'une grande pipe jaune à la forme très caractéristique, faite à partir d'une courge, ou plus exactement du fruit évidé du cresentia cujete, un arbre américain de la famille du bégonia. On en apprend tous les jours, n'est-ce pas ?
C'est déjà un mystère que cette pipe soit devenue un attribut de Holmes lorsqu'on connaît les origines géographiques de cette pipe. En fait, ils ne sont pas contemporains du tout.
Cette pipe est très volumineuse, bien qu'assez légère à cause de la nature du fruit évidé ("élémentaire !" Pour citer un autre cliché). Son extrémité très large à une forme évasée dans lequel un insert en écume de mer forme le véritable fourneau.
Cette pipe était très populaire en Afrique du Sud et les soldats britanniques, victorieux lors de la guerre des Boers, imposèrent son usage en Grande-Bretagne. La calebasse est donc, en quelque sorte, une prise de guerre !
Ainsi, Pretoria ayant été enlevée par les Anglais le 5 juin 1900, on peut raisonnablement penser que ces pipes arrivèrent en Angleterre seulement avec le jeune XXe siècle où elles connurent immédiatement le succès, alors que le corps expéditionnaire était rapatrié.
Donc, pas du temps de Holmes !!!
La preuve par A+B que, non seulement la calebasse n'est pas une pipe canonique (puisque n'étant pas citée dans les textes et ne figurant pas sur les illustrations d'origine), mais qu'elle ne peut même pas l'être car c'est un fait historiquement impossible !
Pipes de bruyère : le bois de bruyère est le matériau classique des pipes en bois fabriquées à partir de souches tubéreuses ou des racines. Le bois est très dur, résistant à la chaleur, léger et respirant telle une matière vivante avec des nervures élégantes ou grain.
Pipes de terre : les pipes de terre sont faites d'une seule pièce d'argile consistante, ce qui les rend extrêmement fragiles. Elles sont légères et absorbent l'humidité. Les pipes traditionnelles ne sont plus fabriquées de nos jours, on trouve n"anmoins des pipes de terre coulées.
Pipes en écume de mer : les pipes en écume de mer sont fabriquées avec de la magnésite pure. C'est une roche sédimentaire calcaire fossile marine ou écume de mer en bloc, en provenance de Turquie.
D'une blancheur absolue, l'écume de mer se sculpte facilement offrant des formes les plus originales. Très légère, résistant à la chaleur mais très fragile, elle a la propriété d'absorber la nicotine et le goudron et la caractéristique de changer de couleur à l'usage.
Sources :
- La FAQ publiée sur le site de la SSHF
- Un article rédigé par Roland Nicolas, sur le site de la SSHF aussi. Juste pour les quelques détaisl supplémentaires.
- Le site "Les dix-sept marches"
- Le site consacré à Jeremy Brett, dans le guide des épisodes "Le dernier problème" qui consacre un article sur les clichés, dont la pipe calebasse.