Meurtre par décret (Murder by Decree) est un film britanno-canadien réalisé par Bob Clark en 1979, inspiré du livre de Stephen Knight: Jack the Ripper: The Final Solution.
Sherlock Holmes et le Docteur Watson sont sur la piste de Jack l'éventreur. Leur enquête va les mener dans l'entourage de la famille royale, du gouvernement britannique et de la franc-maçonnerie.
Jack l'Eventreur sevit depuis plusieurs mois, sans que la police ne parviennent a mettre la main sur lui. Sherlock Holmes est sollicite pour faire cesser l'horrible bain de sang.
Meurtre par Décret – 1979 (Murder by Decree)
Origine : Angleterre / Canada
Genre : Enquête Victorienne
Réalisé par : Bob Clark.
Avec
Christopher Plummer , James Mason , David Hemmings , Susan Clark, John Gieguld, Geneviève Bujold, Donald Sutherland, Anthony Quayle, Frank Finlay.
Résumé : Les habitants de Whitechapel sont de plus en plus terrorisés par une série de meurtres dont sont victimes des prostituées et
qui ensanglante ce quartier de Londres. Ils décident de faire appel à Sherlock Holmes pour résoudre l'énigme.
Ce dernier découvrira d'une façon inéluctable le fin mot de l'affaire. Celle-ci impliquant le Duc de Clarence qui s'est amouraché un temps, d'Annie Crook, une femme de chambre (la honte pensez bien !), dont il a eu un enfant. Témoins gênants de cette liaison, les prostituées ont été tour à tour assassinées afin d'éviter au scandale de s'ébruiter.
Avis (provenant du site "psychovision.net"): C'est forcément au film "From Hell" que l'on pense à la vision de cet excellent "Meurtre par Décret".
Normal puisqu'on y retrouve développée la même théorie à base de complot d'état franc-maçonnique aux dépends de la communauté Juive déjà mal vue par une partie de la population et sur laquelle il semble alors aisé de lui en remettre sur le dos.
Pas de procès selon moi à faire sur le film des frères Hugues somme toute relativement honorable même s'il est loin du génie de la BD initiée par Alan Moore et Eddie Campbell qui elle-même reprenait de façon suprême le même postulat. Postulat que l'on doit à la base à l'écrivain Stephen Knight et son livre "Jack The Ripper, the final solution" paru en 1976 et qu'adapte ici en 1979 de façon extrêmement brillante le non moins brillant Bob Clark dont la carrière basculera malheureusement ensuite dans l'insipide voire l'indigne.
Revenons-en à "Meurtre par Décret" qui voit en 1979 Bob Clark à la tête d'un projet à priori pas si facile à relever, doté qui plus est de son budget le plus imposant jusque là. Celui-ci a déjà fait ses preuves et les amateurs connaissent bien son savoir faire puisqu'il est déjà l'auteur de quelques belles réussites du genre comme "Black Christmas" ou "Le mort vivant" (On pourrait rajouter d'autres films dont on parle un peu moins tels "Children Shouldn't Play with Dead Things" ou le méconnu "Breaking Point". De même on semble lui devoir en bonne partie l'excellent "Deranged").
Bob Clark n'est pas un novice donc et l'on peut même dire qu'il est habitué à diriger des stars sinon des acteurs au talent reconnu. De Keir Dullea à Olivia Hussey, ou encore Margot Kidder, l'excellent John Marley, Bo Svenson en passant par John Saxon. Pas étonnant qu'il parvienne alors à se montrer digne ici du casting improbable qu'il a entre les mains.
Plus que cela et niveau interprétation, le film atteint une sorte de magistral sommet, chacun n'étant rien moins qu'impeccable jusqu'à transcender son sujet et le beau traitement graphique de mise en scène infligé par son directeur.
Si le film pourra par moments paraître un poil bavard, à bien entendre et au grée des visions, aucune phrase (comme aucune scène) ne semble de trop.
Le spectacle est presque parfait et suinte une intelligence maligne dont Bob Clark a le secret. Soit, quelques personnages auraient pu être campés par des acteurs moins prestigieux, je pense là à Genevieve Bujold par exemple dotée d'une ou deux scènes dans un asile et dans l'une desquelles Sherlock Holmes parvient à réveiller son douloureux passé.
Pour le reste, c'est un régal de chaque instant. Les dialogues qui fusent sont incisifs, mordants, d'une intelligence flagrante et lorsqu'ils sortent de la bouche de tels acteurs, admirablement dirigés, au top de leur forme, on aurait tort de bouder son plaisir.
En premier lieu il convient de saluer la prestation de Christopher Plummer ("Starcrash", "La nuit des généraux" pour ne citer qu'eux) qui n'a rien à envier aux meilleurs Sherlock Holmes de toute l'histoire des Sherlock et parvient à égaler ou même dépasser les prestations de Basil Rathbone, Robert Stephens (L'épatante "Vie privée de Sherlock Holmes"), Peter Cushing ("The hound of the Baskerville), ou encore Nicol Williamson (Le non moins excellent "Sherlock Holmes attaque l'Orient Express" avec notre héros totalement cocaïnomane), ou encore John Neville pour une autre variation réussie sur le même thème, le très bon "Sherlock Holmes contre Jack L'éventreur" de James Hill.
Je me répète, son interprétation est exemplaire, un vrai régal, et l'on a le droit à un Holmes déchaîné, tour à tour romantique, cynique, colérique, triste et pourfendeur.
A ses côtés, l'on retrouve ici un Docteur Watson plutôt désabusé mais sans qui Sherlock n'existerait pas (ce qui nous vaut quelques scènes remplies d'humour où Holmes ne cesse de remercier Watson pour son admirable esprit de déduction - sans lequel du reste notre détective patinerait), suprêmement joué par le formidable James Mason, entre laconisme et lassitude.
Que d'épaisseur pour nos héros fatigués !
Pour le reste, c'est une galerie de talents auquel nous avons à faire avec Donald Sutherland passablement allumé mais qui les aidera dans leurs recherches de manière conséquente, puis évidement David Hemmings jouant ici en retrait avec l'intelligence des grandes stars, tout comme John Gieguld ou Anthony Quayle dont les interprétations savoureusement rigides achèvent de donner au film ses airs des fin de siècle londonienne alors même qu'ils n'apparaissent qu'en intérieurs.
En parlant d'intérieurs, il faut dire comment soigne Bob Clark son atmosphère. Les décors comme la photographie y sont splendides. On pourrait presque reprocher au film de faire trop vrai avec ses ruelles sombres, sordides et embrumées et ses prostitués peuplant le quartier de Whitechapel, pourtant c'est un plaisir sensoriel (et ludique) de chaque instant.
Rarement cette époque ci s'est vue aussi soigneusement reconstituée à croire que l'on se trouve devant des tableaux d'époque. On doit ce somptueux travail photographique à Reginald Morris ("L'Empire des Fourmis Géantes") déjà responsable de la photo de "Black Christmas", il est peu dire que ce type avait bien du talent et plus que jamais il éclate ici. Pour rester dans le domaine sensoriel, la partition de "Meurtre par Décret" est signée Paul Zaza ("Meurtres à la St-Valentin") et Carl Zittrer (compositeur de la plupart des oeuvres précédentes du réalisateur dont "Deranged") et est non moins remarquable.
On voit bien à citer ces noms que combien même s'agirait-il d'une commande à la base que son metteur en scène a tenu à s'entourer de fidèles collaborateurs, d'ailleurs au détour d'une ou deux scènes et dans les brumes glauques qui habillent Whitechapel on pourrait presqu'y croiser le tueur en série de "Black Christmas", avec un point de vue subjectif au niveau de la camera et de se poser la question de qui regarde ce paysage effrayant.
Mais il n'y a pas que cela, sinon quoi l'on serait tenté de réduire le film à un pur assemblage de talents qui ont le sait bien (et comme une équipe de football arf !) n'est pas garante d'un film talentueux mais plus souvent académique.
"Meurtre par décret" évite de justesse mais brillamment cet académisme et aux moments les plus opportuns Bob Clark et sa sincérité percent l'écran, semble t-il convaincu lui-même par sa vision romantique et politique de l'histoire, nous balançant un final peut-être entendu (quoique), dans lequel il semble se substituer alors à son éminent personnage pour accuser le doigt haut levé les pouvoirs politiques en place, dénonçant la loi du talion, celle où le pouvoir a justement le pouvoir de par ses alliances souterraines de masquer la vérité et pire, pour se faire, détruisant d'un claquement de doigt des vies (Geneviève Bujold) afin de sauver les apparences et cacher l'enfant illégitime, le bâtard, allant jusqu'à créer un meurtrier en série, puis une psychose collective en même temps d'entretenir la haine raciale, là où ailleurs il se réclame de l'ordre, de la justice et du bon droit.
Et à Sherlock Holmes de s'incliner devant ce pouvoir, réduit ironiquement au rang de simple être humain, de citoyen redevenu lambda pour le coup, et, un peu comme monsieur tout le monde finalement, même savant il restera impuissant.
Excellent film.